Pendaison de crémaillère …. et les autres traditions en Europe
A quelques jours des élections européennes, nous avons décidé de nous interroger sur les différentes manières de marquer le nouveau départ que constitue un déménagement, ce qu’on appelle couramment la pendaison de crémaillère. Même s’il est assez courant d’inviter ses amis dans son nouveau logement pour fêter et marquer cet événement, les expressions que l’on utilise alors ainsi que les traditions nationales regorgent elles de différences culturelles qui nous aident également à percevoir et à comprendre toute la richesse de cette Europe multi-culturelle…
La pendaison de crémaillère, version française
Cette expression moyenâgeuse « pendaison de crémaillère » encore utilisée aujourd’hui par les français pour désigner la fête que l’on organise dans son nouveau domicile, fait référence à une coutume : la crémaillère est une tige de métal dotée de crans grâce à laquelle on pouvait accrocher les marmites au-dessus du feu. Ainsi lorsqu’on organisait une pendaison de crémaillère, cela signifiait qu’on allait préparer un repas, que l’on avait fini d’emménager et que l’on remerciait ceux qui avaient participé au déménagement. C’était aussi une manière de marquer le départ d’une nouvelle étape en festoyant et en mangeant et oui, la France pays de gastronomie !
Les anglais préfèrent chauffer la maison pour chasser les mauvais esprits
Chez les anglais, l’expression ”housewarming” met en avant le chauffage de la maison pour chasser les mauvais esprits !
Il était en général convenu que chacun des invités amenait un peu de bois et l’on inaugurait ainsi la cheminée avec un premier feu qui chauffait la maison et en même temps chassait les mauvais esprits. Les maisons inhabitées étaient considérées comme hantées par des esprits errants, il fallait donc faire un peu de ménage avant de pouvoir y faire entrer de jeunes enfants. Le petit tas de bois apporté par chacun était un peu une contribution à cet effort pour rendre la maison habitable et souhaiter la bienvenue à ses nouveaux occupants.
Cette maison anglaise et la sensibilité aux esprits contraste donc avec le rationalisme à la française et avec un certain caractère terrien et bon vivant, qui transparait dans l’expression même de « pendaison de crémaillère ».
Les suédois, les allemands , les finlandais offrent du pain, du sel et un cadeau
Les suédois, comme les allemands, apportent de quoi se sustenter …
En suède, lors d’un déménagement, la tradition voulait que l’invité apporte ce que l’on appellait un “flyttgröt” (gruau de déménagement), en bref de quoi manger, c’est-à-dire le strict nécessaire pour ne pas être en situation de manque . Aujourd’hui la tradition a évolué mais la coutume d’apporter quelque chose à manger ou à boire demeure. On voit ici, dans cette tradition, poindre un trait de caractère nordique : le pragmatisme et en même temps une certaine forme d’austérité (le lagom pour ceux qui connaissent la mentalité suédoise)
Les allemands, et la tradition remonte également au moyen-âge, apportaient du pain et du sel mais ce cadeau symbolisait plutôt la sédentarité, la prospérité et la fertilité . Le sel à cette époque était considéré comme de l’or et avoir du pain et du sel dans la maison signifiait être en bonne santé et donc apte à se reproduire. On reconnaît ici le pragmatisme des nordiques mais il semble que la tradition allemande fasse aussi référence à la spiritualité anglaise car il était également coutume d’offrir des “haussegen”” (littéralement bénédiction de maison), des sortes de plaques avec inscriptions religieuses que l’on pouvait accrocher à l’intérieur ou à l’extérieur de la maison pour la placer sous la protection de Dieu ainsi que tous ceux qui l’occupaient.
En Finlande, cette fête s’appelle « tupaantuliaiset » ou Tuparit”, et la tradition voulait également qu’on apporte du pain et du sel. Aujourd’hui on apporte toutes sortes de cadeaux, en particulier des cadeaux pour la maison.
Les italiens apportent du liquide (vin ou huile) et du poisson frit
In Italie, et plus précisément en Sicile comme le rapporte un de ses plus illustres représentants, Pirandello, on avait coutume d’apporter du poisson frit Sicilia (Mazara) pour l’inauguration d’une nouvelle maison mais une autre variante sicilienne préconisait d’apporter du liquide (de l’huile ou du vin) que le mot dialectal sicilien “sbagnari” traduit assez bien. Si la tradition du poisson frit (qui fait sans doute référence à une superstition populaire) s’est un peu perdue, celle du vin ou de l’huile subsiste dans certaines régions d’Italie. Le poisson protégeait et augurait l’opulence pour ses habitants, le vin mettait en avant le plaisir de la fête.
Les traditions ont formé les mentalités ou les mentalités ont créé des traditions qui leur ressemblent, en tout cas les confrontations sont assez amusantes ….
Sur ces bonnes paroles, je vous souhaite un bon dimanche !